La Sierra Madre occidentale dans l’Ouest du Mexique abrite une population qui intrigue les chercheurs par ses capacités physiques extraordinaires. Les Tarahumaras, puisqu’il s’agit d’eux, sont capables de courir plus de 100 kilomètres par jour sans trop se fatiguer ! Ils ont été sortis de leur anonymat en 2009 par la parution du livre de Christopher McDougall, Born to Run : a Hidden Tribe, Superathletes, and the Greatest Race the World Has Never Seen [1].
Cette célébrité est d’ailleurs en passe de détruire leur culture et leur tranquillité car leur aptitude très particulière à la course dans une région aux nombreux canyons a attiré les cartels de la drogue qui les utilisent pour des transports clandestins [2].
Quel est donc leur secret ? Les spécialistes sèchent un peu sur la réponse à cette question. Il y a cependant quelques pistes :
ils courent pieds-nus, ou avec des sandales découpées dans du pneu. Lorsque l’on court avec des chaussures, l’attaque du pied se fait par le talon, ce qui produit des chocs à répétition et fatigue l’organisme. Lorsque l’on court pieds-nus au contraire, l’attaque du pied se fait par la plante et produit moins de chocs. Cela expliquerait en partie l’endurance de ces coureurs infatigables. D’ailleurs, de plus en plus de sportifs — notamment des marathoniens — ont recours à la course à pieds-nus ou en sandales légères pour éviter les traumatismes dus à des semelles trop épaisses qui perturbent le mouvement naturel.
on pense aussi que leur mode de vie explique leurs capacités physiques exceptionnelles et notamment leur consommation abondante d’une certaine bière faite à base de maïs, le tesgüino. Ils sont aussi très habitués aux fêtes arrosées de lechuguilla, de la tequila à base de serpent et de cactus [3].
L’arrivée des Espagnols au XVIe siècle les a repoussés dans les montagnes de la Sierra Madre et ils sont restés longtemps isolés du reste du monde.
En les observant courir si facilement sur de longues distances on pense naturellement que nos lointains ancêtres devaient être aussi à l’aise qu’eux lorsqu’ils pratiquaient ce qu’on appelle « la course à l’épuisement ». Dans mon article Pour ce que courir est le propre de l’homme j’ai montré que l’homme n’était certes pas plus rapide que les animaux qu’il chassait mais il leur courait après sur de longues distances et les épuisait. On a vu que les animaux à fourrure ont du mal à évacuer la chaleur. Ils ne le peuvent que par la respiration en haletant, ce qui fait passer de l’air sur leur langue mouillée, mais cela est impossible en courant [4]. Ils finissent donc par s’écrouler et nos coureurs de fond les « cueillent » à ce moment-là.
Ainsi, avec les Tarahumaras, on a sous nos yeux le secret de la réussite de nos lointains ancêtres dans la chasse basée sur la course à pied.